Animal, on est mal.
Si la pluie finit par céder un peu de place au soleil, la mitraille que crache quotidiennement les médias monte comme une inondation dans ma petite tête. Jo Cox* assassinée: les sondages du break sit tremblent et le cours de la Livre remonte. Un peu plus loin, sur de sombres rivages, ce sont de faux gilets de sauvetage qui sont vendus à ceux qui fuient l’horreur: ils coulent en quelques minutes. La liste s’allonge chaque jour, comme ce matin: que ne ferait-on pas pour vendre du ciment? **
Pas de latitude ni de culture qui soit épargnée, et tout ce déluge d’informations finit par me noyer dans une curieuse léthargie.
« Animal, on est mal, et si l’on ne se conduit pas bien, on revivra peut-être dans la peau d’un humain; …; mais Dieu reconnaîtra les siens »***
Dans quelle peau faut-il me glisser? La parabole de la paille et la poutre se retourne comme une chaussette: le gigantisme de la poutre rend de plus en plus difficile la gestion des multiples pailles que j’ai dans les yeux. D’où viennent les chaussures que j’ai achetées hier? Ce franc dans ma poche me manquera-t-il si je le donne à ce mendiant? Et la liste s’allonge. Aussi.
Courage! Je déblaie. J’ouvre mes oreilles et mon coeur à d’infimes petites choses qui me transforment.
* Jeune députée travailliste anglaise, mère de deux enfants, qui militait avec énergie pour le maintien du Royaume-Uni dans l’Europe, assassinée par un humain n’ayant rien trouvé d’autre que de faire allégeance à un groupe néo-nazi américain. Drôle de peau.
** La multinationale Lafargue-Holcim aurait comploté avec le diable pour que ses usines puissent poursuivre leur production dans des terres ensanglantées par le jihadisme.
*** Gérard Manset, 1968.